De meilleures techniques d’entraînement pour autonomiser les jeunes femmes de l’Inde

De meilleures techniques d’entraînement pour autonomiser les jeunes femmes de l’Inde

Par : Linda Whitehead, entraîneure de soccer et agente canadienne SportSTAGES

Il est six heures trente du matin et l’un des membres du personnel d’YUWA ouvre la porte de la maison où attendent sur la galerie un océan de visages féminins souriants, avides d’entamer leur entraînement de football.  Tout d’abord, vous devez comprendre que pour ces jeunes filles, le simple fait de se pointer le nez à YUWA exige beaucoup de courage, puisque c’est un geste qui va à l’encontre de leur contexte culturel. Ajoutez à cela leur joie et leur amour déchaîné du football et vous comprendrez la force irrésistible et contagieuse dans laquelle j’ai eu le privilège d’évoluer. 

Il y a quelques semaines, j’ai voyagé à l’autre bout du monde jusqu’au Jharkhand, l’état le plus pauvre, le plus analphabète et le plus anarchique de l’Inde. Lorsqu’une fille est née au Jharkhand, son avenir a habituellement déjà été tracé pour elle. Elle est isolée; si on ne l’observe pas à travailler, elle est harcelée. Elle est illettrée : plus de six femmes sur dix ne savent pas lire. On la marie; le Jharkhand est l’état de l’Inde où il y a le plus de mariages d’enfants. Et elle demeure vulnérable, on estime que près de 30 000 filles du Jharkhand sont trafiquées à chaque année. Elle devient enceinte. Le cycle se perpétue. YUWA utilise le soccer (football) au Jharkhand pour autonomiser les jeunes filles et combattre le mariage d’enfants, l’analphabétisme et le trafic humain.  En existence depuis maintenant plus de quatre ans, YUWA compte plus de 250 filles qui participent au programme et qui ont gagné le respect des villageois, en collaboration avec leurs parents. En plus d’offrir des entraînements de soccer le matin et en fin d’après-midi, YUWA enseigne aussi l’anglais, les mathématiques et des aptitudes à la vie quotidienne aux filles.  La capitaine d’équipe fait un suivi de leur présence à l’école; elles doivent fréquenter régulièrement l’école pour participer. YUWA avait fait une requête auprès de SportSTAGES : on voulait améliorer l’expertise au niveau de l’entraînement du soccer. Voilà où j’entre en scène.   

J’ai passé ma première journée à YUWA House en observant leur routine, à regarder leurs entraîneurs et joueuses en action et en discutant de leurs besoins en matière de soccer avec Franz Gastler, le fondateur de l’organisme. J’étais tellement impressionnée par l’enthousiasme et la passion des jeunes entraîneurs à travailler avec les joueuses dans des conditions qui seraient considérées impossibles en Amérique du Nord : trop de joueuses, trop peu de ballons, trop peu d’espace et des terrains de terre irréguliers. Toutefois, la concentration et l’intensité déployées par les jeunes éclipsaient de loin les insuffisances des besoins physiques de l’entraînement. La joie de « jouer avec compétence » était tellement vive qu’elle a capté toute mon attention et tous les autres problèmes semblaient périphériques.  

La journée suivante, j’ai animé un atelier avec Franz, sept entraîneurs adolescents de YUWA et trente-six de leurs joueuses senior (U15). YUWA espère que d’ici un an ou deux, plusieurs des joueuses senior choisiront de devenir entraîneures au sein de l’organisme. Sandeep, un bon ami de Franz et un entraîneur local de soccer, a aidé à traduire mes instructions de l’anglais à l’hindou.  En m’appuyant sur mes observations de la veille, l’atelier était axé sur la méthodologie de l’entraînement et sur l’importance d’incorporer un thème dans la séance. J’ai fait un entraînement modèle et j’ai ensuite facilité une séance avec les entraîneurs pour planifier et mettre en œuvre un plan d’entraînement avec l’aide des joueuses. On a estimé que la journée avec porté fruit lorsque Franz, Sandeep et moi-même avons observé les jeunes entraîneurs mettre en œuvre avec succès certaines parties de l’entraînement planifié avec les joueuses, dans une ambiance amusante, mais à la fois sérieuse.

Entre assister aux entraînements et agir comme mentor auprès des entraîneurs, le temps que j’ai passé à YUWA House a été consacré à enseigner au personnel de YUWA les enjeux techniques, tactiques et physiologique de l’entraînement d’athlètes féminins. Il y avait tellement à discuter et si peu de temps à notre disposition. Toutefois, nous avons été en mesure de rapiécer un plan d’action pour les prochains mois au cours duquel je créerai un curriculum d’entraînement pour former davantage leurs entraîneurs, que je pourrai leur envoyer électroniquement. De plus, j’aiderai l’organisme à élargir leurs contacts dans le monde du football international et je fournirai un soutien administratif sur quelques projets existants. J’anticipe une relation continue enrichissante avec YUWA et je remercie tout le personnel de SportSTAGES pour cette merveilleuse expérience, une leçon d’humilité.